Le Conseiller général des établissements de santé M. Ballereau, a remis son rapport sur la réforme de la biologie médicale le 23 septembre 2008, commandé en janvier de la même année par la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, Roselyne Bachelot. Le gouvernement a souhaité 33 ans après la réforme de la biologie médicale (1975), d’en entreprendre une nouvelle, destinée à préparer l’avenir de cette discipline.
L'objectif annoncé de la réforme est de permettre à chacun d'avoir accès à une biologie médicale de qualité prouvée, payée à juste prix, dans un cadre de la santé européenne.
La biologie est une discipline médicale. C’est pour cela que le rapport prône un dialogue permanent qui doit avoir lieu entre le biologiste et le patient d'une part, le biologiste et le clinicien d'autre part. Le caractère médical de la discipline doit être renforcé et les compétences des professionnels de santé qui l’exercent (formation initiale et formation continue), doivent être valorisées et mieux utilisées pour améliorer la pertinence du diagnostic et du suivi.
La qualité de l’ensemble de l’activité des laboratoires passera à un monitoring permanent, ce qui suppose une formation initiale et continue des biologistes, des techniciens et des secrétaires. De plus, les biologistes devront acquérir la possibilité d’amender les prescriptions mal-adaptées à la question clinique posée.
L’accréditation dans le projet de réforme sera obligatoire pour tous les laboratoires de biologie médicale sur la totalité des examens. Une période transitoire sera mise en place pour les laboratoires existant actuellement : trois ans pour la première étape marquant la volonté d’accréditation sur la totalité de l’activité et six ans pour l’accréditation obligatoire effective.
Le règlement européen du 9 juillet 2008 impose un organisme d’accréditation unique dans chaque pays. En France, le COFRAC [1] est aujourd’hui l’organisme d’accréditation. Il a accepté de créer une section « santé humaine ». La norme de référence sera la norme européenne ISO [2] 15189. La définition exposée par ce rapport impose aux laboratoires de biologie médicale, de participer à l’offre de soins et permet l’existence de laboratoires multisites sur un territoire de santé. Il en résulte une plus grande liberté d’organisation et la fin de règles telles que le rattachement du biologiste à un site.
Le rapport propose que tout investissement dans le capital des laboratoires soit libre, à l'exception d'incompatibilités strictement définies (ex : conflits d'intérêts). Afin de garantir l'indépendance des analyses, le biologiste sera majoritaire sur tous les choix stratégiques (ressources humaines, achat d’automates…).
La mission sur la réforme de la biologie médicale recommande, une diminution des prix portant sur les examens dont les analyses sont automatisées et l’interprétation standardisée. De plus, elle souhaite un arrêt des prescriptions non pertinentes qui entrainera une baisse des volumes d’analyse effectuées par les laboratoires. Ceci permettra la cotation d’actes récents dont doivent bénéficier les patients. Elle préconise que les économies soient annoncées sur un terme de 3 à 5 ans.
Suite à la parution du rapport Ballereau, un sondage a été effectué auprès du grand public en octobre 2008. Il a été demandé par l'Intersyndicale des biologistes au BVA (instituts de sondage Brulé Ville et Associés). Les résultats [3] de ce sondage révèlent que :
- 89,6 % des personnes interrogées souhaitent conserver un laboratoire d'analyse à proximité.
- 85 % sont contre le fait que des investisseurs non-biologistes (et donc non professionnels de santé) puissent détenir des laboratoires d'analyses.
- 86,5 % souhaitent que la réforme puisse être discutée au parlement et non pas mise en place directement par voie d'ordonnance.
Le rapport Ballereau formule des recommandations dont certaines suscitent la crainte et la colère des biologistes comme:
- L’ouverture du capital des laboratoires,
- Et l’adoption de la réforme par voie d’ordonnance sans débats parlementaires.
Mme Bachelot s'est exprimée au cours de deux rassemblements professionnels (XIXèmes journées de l'Ordre des pharmaciens et les JIB [4] 2008). Elle a indiqué que cette réforme répondait à la mise en demeure par la Commission européenne en 2005 et que le « processus est arrivé à une phase irréversible ». Elle précise également que l’ouverture du capital ne sera pas imposée de manière brutale.
Durant son discours, la ministre précise que « cette réforme […] doit faire l’objet d’un débat parlementaire » mais qu’il serait « souhaitable d’éviter d’y soumettre chaque article technique » pour ne pas alourdir les débats. Elle exprime clairement sa volonté de fonctionner par le biais d’ordonnances et non d’amendements surprises.
Vous trouverez le discours de la Ministre de la Santé de la Jeunesse et des Sport, Mme Bachelot, prononcé durant les JIB 2008 sur le site : www.sdbio.fr. Le président de l'Ordre des pharmaciens et le président du Syndicat des Biologistes, les deux représentants majeurs de la profession sont opposés à cette ouverture de capital et s’interrogent.
Si l’ouverture venait à être adoptée, les biologistes conserveraient-ils oui ou non la maîtrise de leur laboratoire ?
La profession de la biologie s’inquiète et estime que l’ouverture du capital lui ferait perdre beaucoup notamment :
- La qualité des soins,
- De nombreux emplois,
- La pérennité du système de financement de la santé.
De plus, elle pense que seule la finance prendrait le dessus en particulier pour le choix des automates d’analyses biomédicales.
De son coté, la commission européenne de Bruxelles fait pression pour l’adoption de l’ouverture du capital. Certaines personnes de la profession, comme le président du Syndicat National des Médecins biologistes, soutiennent que l'accréditation est un axe de la restructuration de la profession souhaitée par le ministère.
Mais, ils estiment que le chiffre d’affaire des laboratoires va doublement baisser : d’une part par la baisse des recettes stipulées par le rapport Ballereau et part la lourde charge financière engendrée par l’accréditation.
Le rapport Ballereau ne fait pas l’unanimité !
Avant l’adoption de la loi, il serait judicieux de trouver un juste milieu entre les professionnels de la santé et les financiers. Les financiers ne devraient pas avoir la majorité pour les décisions techniques et le médicales. Effectivement, celles-ci demandent des connaissances en biologie médicale.
De plus, les choix d’automate ou des analyses effectuées par le laboratoire ne peuvent pas être effectués que sur des critères économiques.